Le Delap de Maxime Laisney
Nous avons chacune et chacun « notre Delap ». Et pourtant nous allons dire beaucoup de choses similaires à son propos. Parce que ces sentiments s’imposent. Brillant, humain, avec un sens profond des responsabilités individuelles dans l’aventure collective et devant l’Histoire. « Ici, chacun sait ce qu’il veut, ce qu’il fait quand il passe. »
Bien sûr « ami, si tu tombes, un ami sort de l’ombre à ta place… » Mais tu nous manques, François.
Delap m’a d’abord séduit intellectuellement lors des Conseils nationaux de PRS que j’ai rejoint lors de la campagne du NON au TCE en 2005. Un propos clair et éclairant, c’était convainquant sans qu’on assiste à la messe : des arguments, des analyses, on pouvait juger sur pièces. Il fallait reconnaître que ça collait, que ça tenait bien ensemble. Ça donnait méchamment envie d’y aller.
Notre véritable rencontre s’est faite en plus petit comité, lors d’une formation à la sociologie de Bourdieu. Delap avait le talent de présenter des thèses dont l’auteur lui-même n’était pas toujours le plus grand pédagogue ; le jeune instit que j’étais venait de trouver un excellent professeur pour donner du sens à son métier.
Alors ce furent les réunions tardives du Comité Technique National du Parti du Gauche que nous venions de fonder, avec une poignée de cinglés qui avaient quitté le PS pour « renverser la table ». Delap y traduisait en actions très concrètes les orientations politiques décidées par le Secrétariat National juste avant. Responsables chacun d’un pôle du parti, nous n’étions pourtant pas des soldats. Delap réfléchissait avec nous à la bonne manière de faire, puis nous faisait confiance pour avancer. Et ça marchait.
Il arrivait même qu’il nous consulte pour ses fameux éditos de A Gauche : « Ne devrais-je pas faire un peu plus court ? » J’étais contre, évidemment ! Car cette feuille de chou aura contribué à former des milliers de militant.es dans le pays, articulant chaque semaine l’actualité avec notre triptyque Ecologie – Socialisme – République. Un édito qu’il aura tenu à écrire quasiment jusqu’à son dernier souffle, comme pour dire avant de partir que tout ce temps et toute cette énergie qu’il aura consacrées à la politique n’étaient pas un passe-temps sans raison, mais un engagement complet et conscient.
Un édito aussi délicieux que les petits plats qu’il aimait cuisiner lorsqu’il recevait chaleureusement avec Charlotte : cuisine ou politique, il était maître des arts d’exécution.
Bref, tu nous manques, François. A tous points de vue.